dimanche 30 juin 2013

Point d'étape et fin d'année...


Mes sentiments sont confus en cette veille de vacances. J'ai l'esprit occupé bien entendu par la fin d'année scolaire, avec son lot de tâches "à boucler"... Entre les élèves, la direction de l'école, quelques réunions encore, la dernière main à mettre dans quelques paperasses, la préparation déjà de la rentrée de septembre, ce n'est plus une "dernière ligne droite" car il y a trop de virages serrés à prendre. J'ai l'esprit embrumé, le corps fatigué, la chance aussi heureusement d'avoir maintenant une longue expérience qui me permet de bien planifier mon temps sans gaspiller une énergie qui à mon âge fait parfois défaut.

Mes sentiments sont confus car je ne sais plus trop quoi penser de ce qui nous attend, directrices et directeurs d'école, au premier trimestre de la prochaine année scolaire. Je veux tenter de faire un point d'étape, mais ce n'est pas simple tant les annonces ministérielles se succèdent rapidement, comme les commentaires syndicaux à géométrie variable, ou les informations que je peux capter "par la bande".

Je dois reconnaître que depuis quinze ans jamais une telle attention n'avait été portée à la direction d'école. Le GDiD a clairement gagné la partie, après une douzaine d'années d'investissement fort de la part de ceux qui ont été au départ de l'association. Je rends hommage, en toute sincérité et avec franchise, à Alain Rei et Pierre Lombard, comme à d'autres qui se reconnaîtront, qui font encore partie du GDiD ou l'ont quitté, mais n'ont jamais perdu l'espoir de voir un jour reconnues légitimes les aspirations de l'association. Je n'en fais partie que depuis un tiers du temps qui fut le sien, mais j'espère depuis ces quatre années avoir pu donner ne serait-ce qu'un peu à une cause commune qu'il me parait toujours indispensable de défendre si on croit à l'avenir de l'école publique: le statut nécessaire des directeurs d'école n'est pas un caprice ni une péripétie anecdotique dans l'histoire de l’École, mais bien une mesure indispensable pour la réussite de nos élèves ces prochaines années. Dans un monde difficile, où pouvoir travailler devient une chance que tous ne pourront peut-être pas avoir, la France doit faire le maximum pour que l'école publique française redevienne un modèle d'efficience que malgré tous les efforts des agents de terrain elle n'est plus.

Oui, jamais depuis l'abandon absurde du décret instituant les "maîtres-directeurs" on n'avait porté autant d'attention à notre mission. Ce n'est pas le fruit du hasard, le GDiD a su convaincre certains syndicats d'enseignants -vaincus déjà il faut dire par leur représentation aujourd'hui à la portion congrue-. Ceux qui faisaient défiler contre les "maîtres-directeurs" en 1987 ne mobiliseraient aujourd'hui personne. La nécessité d'un "pilotage" -ou donnez-lui le nom que vous voulez- au plus près des besoins du terrain s'impose aujourd'hui à tous. Et tous le disent: enseignants qui le réclament, députés et sénateurs qui en pointent la nécessité, public qui le demande, municipalités qui l'appellent de leurs voeux... Il reste quelques irréductibles arc-boutés sur les images passées d'un monde ouvrier idéalisé alors qu'il n'a jamais existé, ils ne représentent plus rien ni personne et disparaîtront bientôt dans les poubelles de l'histoire de l'éducation.

Mais il règne une certaine confusion qui ne m'aide pas à faire le point, entre annonces catégorielles pour les enseignants du primaire en général, annonces quant au fonctionnement des écoles, et annonces ou pistes spécifiques à la direction d’école.

Ainsi les enseignants du primaire recevront-ils désormais une prime similaire à celle des enseignants du secondaire, qui indemnise le temps passé au suivi des élèves, très important dans le primaire. Elle ne sera certes pour l'instant pas du même montant, mais on peut penser qu'elle l'atteindra d'ici quelques années, si le budget de l’État se porte mieux. De même, il est évident que la rémunération des enseignants du primaire, dont l'OCDE dans son dernier rapport sorti il y a deux jours pointe encore l'absurde différence avec celle des enseignants du secondaire, sera dans les années qui viennent mise à niveau. Même si certaine centrale syndicale du secondaire gémit à l'injustice, estimant sans doute -nous en avons l'habitude- que les professeurs du primaire ne fichent rien. Je vois pour ma part dans ce genre d'éructation nauséabonde que le fruit d'un affolement qui a pris toute la FSU devant son incapacité à mobiliser, et devant l'avance que prennent l'UNSA et d'autres avant des élections professionnelles qui approchent à grands pas.

Ces mesures indemnitaires et salariales sont, seront, bien évidemment étalées dans le temps, et ne sont et seront que simple justice alors que les professeurs désormais reçoivent ou recevront tous la même formation, qu'ils enseignent en école, au collège ou au lycée. Je veux bien laisser à part le difficile concours de l'agrégation, qui marque des compétences et des connaissances particulières; encore faudrait-il que ces enseignants de valeur soient effectivement employés là où ils sont nécessaires, dans les classes préparatoires et dans le Supérieur.

Il s'agit donc de mettre fin à une discrimination salariale absurde, j'en rends grâce au ministre qui a le courage de s'y atteler. La tâche est difficile dans les conditions actuelles de serrage du budget de l’État, c'est donc doublement méritoire, mais franchement quelle centrale syndicale oserait s'élever contre? Le gouvernement craint comme la peste les réactions syndicales -à tort, aujourd'hui le terrain est fort et exaspéré, les syndicats sont faibles- et voit donc là une piste aussi facile à suivre que juste. Tant mieux. Parallèlement, le ministre de l’Éducation nationale augmente, petit à petit aussi, le nombre d'accédants à la hors-classe dans le primaire, qui on ne sait pour quelle raison n'est que de 2% par an alors que dans le secondaire elle est de 7%. Voilà aussi une mesure qui n'est que justice. Je suis heureux qu'un gouvernement qui se dit "de gauche" montre le désir d'aller vers une égalité de traitement qui pour le coup n'est que simple équité -j'aime le mot "équité"-.

Il faut dire que ce gouvernement demande beaucoup au terrain, dans le primaire, avec le changement des rythmes scolaires et d'autres mesures qui suivront. Mais rappelons-nous que depuis des années d'autres changements plus douloureux nous avaient été imposés -sans que nos syndicats prétendument représentatifs bougent le petit doigt-, et que rien pour autant ne nous avait été octroyé; nous étions de plus en plus sollicités, pour des choses par ailleurs aussi idiotes qu'une rage soudaine d'évaluation ou une folie exacerbée de réunionnite, et voyions parallèlement le nombre de postes d'enseignants diminuer drastiquement, au point d'avoir aujourd'hui dans nos classes des effectifs pléthoriques qui ne contribuent pas à la réussite individuelle de nos élèves. J'en sais quelque chose, j'ai connu deux fermetures de classe dans cette période, comme j'ai vu nombre de remplaçants disparaître du paysage. Je ne me plains pas en revanche du laminage des RASED, ayant toujours proclamé leur totale inefficacité de fonctionnement. Ce qui ne signifie pas que je voulais les voir totalement disparaître, non, j'aurais simplement bien apprécié qu'on les fasse travailler différemment. J'ai toujours pensé, et je crois toujours, que la place d'un élève est au sein de sa classe, et que le meilleur moyen de l'aider est de l'y soutenir dans ses apprentissages, pas de l'en sortir pour lui administrer ponctuellement quelque potion fumeuse.

Notons aussi, ce n'est pas un détail pour moi, l'abandon presque complet de l'évaluationnite aigüe qui a touché notre profession, et dont je réclame encore qu'on m'en prouve l'utilité. Je n'évoquerai que pour mémoire ce qu'on réclamait aux enseignants de maternelle dont je fais partie, demandes ridicules qui ne prouvaient qu'une chose, à savoir l'ignorance totale de notre ministère, mais aussi hélas de nos IEN, de la façon dont grandit intellectuellement un enfant entre trois et six ans: faire de l'évaluation notionnelle normative à ces âges relève d'un esprit malade. Réclamer d'un enseignant de petite section qu'il bloque une semaine par trimestre pour faire des évaluations de langage, et je n'invente rien puisque c'est ce qu'a osé suggérer un IEN de ma connaissance, c'est... tiens, je n'ose même pas dire ce que c'est!

Je ressens également un fort soulagement quant à la disparition de l'aide personnalisée, tant elle était inadaptée à mon travail, absurde en maternelle quand les enfants après une journée de classe lors de laquelle ils ont été longuement sollicités ne rêvent que de calme et de repos, suçant leur pouce affalés dans le lieu de regroupement. Absurde aussi car elle nie tout ce que je crois quant à ce que doit être une journée de travail avec des élèves entre trois et six ans, qui ne peuvent être mis à contribution qu'individuellement si on veut être efficace, ce qui d'ailleurs à mon sens est aussi le cas en élémentaire comme dans les premières années du collège, l’enseignement collectif ne devenant efficace que lorsqu'un enfant a acquis ce qui lui est nécessaire de compétences d'apprentissage et de méthodes de travail. Si en maternelle on ne fait que du collectif à longueur de journée, du scolaire éloigné de l’individu, à grand renfort de "fiches" toutes prêtes et inadaptées, il est certain que la moitié des enfants ne comprendront rien, désespéreront et se fatigueront inutilement. Je suppose que l'enseignant, en toute bonne foi et parce qu'il n'a rien compris de son métier, considérera alors la moitié de son effectif comme "en échec". Mais c'est un autre débat.

Il reste beaucoup à faire, laver à grande eau les programmes par exemple. M. Peillon a devant lui un chantier peu ordinaire, j'espère qu'il tiendra le coup. Parce que j'avoue que malgré mes préventions après la "grande concertation" dont on nous a rebattu les oreilles en 2012, je vois aujourd'hui un homme que je pense honnête et qui me semble prendre la bonne voie. Ne me faites pas mentir, M. Peillon! Je suis critique, mais je sais aussi reconnaître les mérites d'autrui.

Reste la question cruciale de la direction d'école.

Je l'ai écrit plus haut, le ministre craint les syndicats. A tort. Leur puissance ou leur aura maintenant n'est plus à la hauteur de leur réputation. Je ferai abstraction du trio infernal des syndicats d'extrême-gauche qui ne veulent rien savoir, ne pensent rien et disent non à tout: ils ne représentent qu'eux-mêmes, c'est à dire personne, et leur audience chez les enseignants est aussi nulle que leur niveau intellectuel. Leur capacité de nuisance est également réduite à la portion congrue, il suffit de voir leurs derniers appels à la grève ou à manifester qui ne réunissent plus que quelques pékins égarés dont les parents communistes ou trotskystes vivotaient dans l'attente d'un "grand soir" qui s'est finalement avéré une nuit bienfaisante. Ignorons-les. Ignorons aussi le SGEN-Cfdt, qui ne sait plus où il en est: il s'est égaré, fourvoyé, perdu, il erre désespérément dans la forêt à la recherche de la sortie, mais tourne en rond. Ignorons enfin les "petits syndicats", qui ne représentent pas plus d'enseignants qu'ils n'en représentaient avant, et existent encore on ne sait trop pourquoi. Je le déplore, certains ont de bonnes idées. Mais bon. En revanche, c'est à un combat de titans que nous assistons entre les deux frères ennemis issus de l'heureusement défunt SNI-pegc, à savoir le SE-Unsa progressiste et le conservateur SNUipp. Enfin, de titans... j'écris ça pour leur faire plaisir. J'observe plutôt une lutte de nains, un pugilat désespéré pour attirer les derniers syndiqués d'une profession qui ne l'est plus qu'à 15%, contre 70% il y a trente ans. Néanmoins, il ne faut pas sous-estimer la capacité de nuisance de ces gens-là, dont les déclarations les plus ridicules arrivent encore à trouver un écho chez certains enseignants désespérés ou trop bêtes pour voir plus loin que le bout de leur nez. Quand je lis ce qu'arrivent à écrire dans les forums internet certains de mes collègues, je me dis que vraiment l'être humain est encore loin de l'ultime niveau de conscience, et qu'il va encore falloir de nombreux cycles de réincarnation.

Pourtant la nécessité de donner aux écoles leur autonomie, et par définition aux directeurs d'école un statut clair qui leur permettre d'encadrer cette autonomie, est aujourd'hui une évidence pour tous ceux qui croient en l'avenir de l'école publique, pour tous ceux qui ont compris que l'éducation est pour une Nation un investissement indispensable, pour tous ceux qui voient clairement que seul un directeur d'école à la mission parfaitement définie et aux prérogatives élargies peut donner à TOUS les élèves de son école la certitude d'un investissement complet au service de leur travail, sinon la garantie de leur totale réussite scolaire.

Cette évidence est partagée par les élus locaux, par les représentants de la Nation à la Chambre ou au Sénat, par la plupart des familles, celles du moins qui s'investissent dans l'éducation de leurs enfants et comprennent le rôle primordial de l'école.

J'ai ouï dire, parce que j'ai des antennes un peu partout et de grandes oreilles, que certaines des mesures d'urgence que je réclame sur ce blog depuis des mois pourraient être discutées, voire proclamées, à la prochaine rentrée. J'aurais espéré un calendrier plus rapproché, une ou des annonces dès cette fin juin afin d'apporter aux directeurs d'école de meilleures perspectives, de donner envie de continuer et de combattre la lassitude qui nous accable tous. Je ne suis pas le maître. Et comme vous tous, chers collègues qui vous accrochez encore, je prépare la rentrée de septembre sans joie mais avec conscience. Néanmoins, sachant qu'à part les syndicats seul le GDiD a été écouté ce mois-ci au ministère lors des discussions concernant le direction d'école, sachant que le GDiD sera également sollicité en parallèle des négociations de septembre qui légalement ne peuvent concerner que les instances syndicales, j'ai bon espoir que nombre de nos revendications seront entendues, d'autant que le SE-Unsa lui-même en soutient une grande partie. Nous aurons au moins un allié dans la place, sans compter un ministère qui peut-être a eu le temps d'appréhender la réalité du fonctionnement du terrain comme ses évidents besoins de structuration locale. Il faudra combattre un SNUipp hésitant qui se réfugiera peut-être dans ses vieilles lunes par peur du changement. Je ne peux pas, je ne veux pas imaginer qu'une partie même seulement de ce que nous réclamons puisse nous être refusée, car ce serait le signal de l'effondrement de l'école telle que je la souhaite, structuré et efficiente, au plus près des besoins de nos élèves. Je crains qu'alors nombre de directeurs et directrices encore accrochés parce que bercés d'espoir lâchent définitivement leur mission, ce qui signifierait l'abandon soudain de millénaires d'expérience cumulée.

Je ne crois pas pour autant que les directeurs d'école obtiendront un statut dans l'immédiat. Je ne suis pas un imbécile, et il faut un début à tout, même à l'abandon du syndrome "caporaliste" par certaines centrales syndicales qui se dandinent encore d'un pied sur l'autre comme un tout-petit qui a envie de faire pipi.

Et puis il faudra être clair, même vis-à-vis de nos alliés dans la place. J'ai reçu un mauvais signal hier dans le courrier électronique de mon école en recevant la proposition d'employer une EVS l'an prochain. J'ai déjà donné, merci. Même sans décharge je préfère encore faire mon boulot moi-même, cela me donne moins de peine et me prend moins de temps que d'en expliquer la teneur à une personne qui ne panne que couic au fonctionnement d'une école, quand elle comprend ce que je lui explique, et derrière laquelle je devrai néanmoins passer pour vérifier son travail.

Je peux admettre que le SE-Unsa, qui avait démarré cette ânerie en 2006 en signant le fameux "protocole" qui lui avait valu de perdre largement les élections professionnelles suivantes, reste dans sa propre logique en imaginant faire perdurer un système qui consiste à créer des milliers d'emplois précaires et inadaptés. Je peux l'admettre, mais je ne le soutiens pas. J'y suis même farouchement opposé, car je considère les EVS comme un cache-misère, une façon déloyale et coûteuse de détourner l'attention du vrai problème qui est celui du statut des directeurs d'école. Ce n'est pas du temps d'un autrui incompétent dont j'ai besoin, c'est du temps professionnel d'un enseignant qui pourrait me décharger de mon travail de classe pour me permettre de me consacrer à ma mission. Car contrairement à certains rien ne m'y rebute, même les tâches les plus ingrates, tant je sais que c'est au service de mes élèves que je les remplis, en facilitant le travail de mes collègues. Oui, j'ai du plaisir quand je déballe et vérifie des livraisons, ou quand je fais un inventaire. Pourtant je le fais sans aucune décharge, après mon temps de classe. Vous avez le doit de me prendre pour une andouille, je ne vous l'interdis pas. Mais pour moi la mission de direction est globale, elle inclut tout ce que je considère comme nécessaire au fonctionnement général de mon école. A mon âge, on ne se refait pas.

Dans cette optique de l'arbre qui cache la forêt, je comprends aussi que le SNUipp soutienne aujourd'hui activement l'arrivée des EVS dans les écoles, alors que ce syndicat a farouchement combattu la chose il y a peu. Pour le SNUipp, c'est une excellente façon d'ignorer la revendication du statut des directeurs d'école, ou du moins de la retarder au maximum, tant je crois ce statut imparable et irrévocable. C'est bien pourquoi je considère que le SE, pris à son propre piège, a eu tort de persister à les réclamer. Le ministère pense sincèrement que la mesure qu'ils ont prise, comme l'arrivée aussi de "contrats aidés", est une aide réelle pour les écoles. Ne nous leurrons pas, chers collègues directrices et directeurs d'école, c'est de la glu que l'on vient de répandre sous vos pas, un moyen pratique de ne pas vous accorder rapidement ce que vous souhaitez autant que moi, un statut qui vous libère les épaules et vous permette d'accomplir au mieux votre mission de direction. Il faut arrêter les blagues, comme l'écrivait récemment le SGEN-Cfdt: c'est d'un statut que nous avons besoin. Mais je crois vraiment le ministère sincère, il se laisse bercer par les sirènes syndicales. J'espère qu'il aura entendu les représentants du GDiD.

Voilà où j'en suis. En cette fin juin, la tête lourde de fatigue, le corps épuisé, je veille à terminer ce qui doit être fait, à préparer ce que je peux anticiper. Nous nous acheminons vers les vacances, en espérant que les conditions climatiques nous permettront de souffler et de faire le plein de lumière. Je vais dès ces derniers mots écrits me servir un pastis, car le soleil brille par la fenêtre du lieu où je tape ces mots. Je vous souhaite, chères et chers collègues, amis lecteurs qui me suivez dans mes réflexions, soutiens ou détracteurs, de bonnes, reposantes et méritées vacances, car je ne sais pas si j'aurai la force d'ajouter avant samedi prochain un nouveau billet. A moins qu'une annonce ministérielle...

dimanche 23 juin 2013

La rentrée sera lourde...


Le GDiD a été reçu au ministère de l’Éducation nationale jeudi dernier. En cette fin d'année qui pour chacun d'entre nous, directrices et directeurs d'école, est synonyme de tâches multiples et simultanées, on ne peut décemment reprocher aux bénévoles de l'association de ne pas immédiatement communiquer sur le sujet, car j'imagine que tout autant que moi ils ont la tête dans... euh... dans ce que vous voulez (cirage, semoule, purée -ou pire-). D'autant qu'il est décent et raisonnable de ne pas couper l'herbe sous le pied du ministère, qui ne se réjouirait certainement pas de voir étalées au grand jour des propositions ou pistes de travail qui devront pour la plupart être discutées avec les syndicats en septembre lors de "l'agenda social". Soyons sérieux.

J'imagine tout de même que le GDiD ne va pas tarder à nous faire parvenir quelques informations, avant les vacances j'entends. Informations qui seront lourdes de conséquences pour le GDiD comme pour le ministère. Effectivement, il est clair que le GDiD est aujourd'hui unanimement considéré comme un interlocuteur sérieux et compétent, représentatif, à la présence justifiée dans toute discussion concernant les directeurs d'école. Ces derniers ne s'y trompent d'ailleurs pas en étant toujours plus nombreux à rejoindre l'association, ce dont je me réjouis fortement car le nombre fait la force face à des centrales syndicales qui pour certaines mettaient encore récemment en doute notre représentativité. Si vous ne l'avez pas fait, prenez donc dès aujourd'hui votre adhésion pour l'année scolaire 2013-2014, ces vingt euros vous rapporteront je pense beaucoup. Je suis persuadé que le nombre d'adhérents va exploser de façon justifiée. Mais le ministère également a tout intérêt à ce que le GDiD communique rapidement! N'oublions pas que le SE a posé récemment une "alerte sociale", préalable à un préavis de grève. Il serait dommage d'observer dès la prochaine rentrée un mouvement difficilement contrôlable comme pourrait l'être une grève des directeurs d'école -une grève administrative avec abandon des clés OTP?- et leur refus de communiquer tout chiffre et toute information.

D'autant que cette rentrée de septembre 2013 est cruciale pour l’Éducation nationale et M. Peillon, puisque nous verrons les premières applications de la "refondation". Disons-le, la rentrée sera lourde. Pas uniquement pour les écoles qui passeront aux nouveaux rythmes scolaires, et dont les directeurs vont certainement s'arracher les cheveux à jongler entre leur classe, leur direction d'école, la gestion des nouveaux horaires et celle des temps communs avec le périscolaire, etc. Mais aussi pour toutes les écoles qui n'y passeront pas et dont les directeurs devront néanmoins en plus de leurs six heures de classe organiser des APC, gérer les temps de réunion, j'en passe et des meilleures. Le ministère a largement alourdi pour septembre 2013 la barque d'une gestion déjà difficile au quotidien sur le terrain. Je fais mes condoléances aux directeurs d'école de ce pays, chers collègues, je compatis à nos prochains soucis.

Je fais aussi tous mes vœux aux collègues imprudents qui voudront intégrer dans leur école un EVS ou un "contrat aidé"... Franche rigolade en perspective! Le ministère a certainement cru sur parole des syndicats qui après avoir dit pis que pendre des EVS veulent aujourd'hui en mettre partout, en dépit de toute logique, mais surtout en dépit des dénégations des directeurs d'école qui voudraient du temps à eux, du temps de professionnel, et non du temps de personnels non formés, souvent incompétents, quand ils ne sont pas totalement réfractaires à cet emploi étrange de bouche-trou scolaire payé au rabais. Je suis persuadé que M. Peillon est ravi d'avoir fait avec ces EVS et ces "contrats aidés" quelque chose pour l'école. Dramatique erreur, dont on verra le résultat sur le terrain dès la rentrée avec à mon avis des cafouillages monstrueux.

Il est donc très important que, dans ces circonstances qui s'annoncent difficiles, le GDiD communique avant les vacances, afin de prévenir d'inévitables montées de colère chez des directeurs d'école sans perspective. Se dire que telle ou telle amélioration sera rapidement mise en place nous permettra de patienter. Mais sans annonce avant les vacances, je doute que l'énergie et la bonne volonté des directeurs d'école ne soient pas sérieusement écornées. Le ministère aurait donc tout intérêt à faire un geste rapide, dans les quinze jours qui restent.

Des trois mesures urgentes à prendre que j'ai déjà évoquées dans ce blog, l'une devra clairement attendre septembre, celle de l'éventuelle généralisation du point d'indice supplémentaire pour l'accès à la hors-classe dont il est logique et raisonnable d'imaginer qu'elle sera discutée lors de "l'agenda social" dans le cadre des mesures plus larges quant à la revalorisation de la fonction. J'aspire évidemment toujours à la création d'un statut pour les directeurs d'école, même si certains syndicats que je ne nommerai pas par charité chrétienne, se gargarisent déjà que ce ne sera pas le cas (attendez les prochaines élections professionnelles de 2014, mes cocos, on va rire!). Sur ce point, je ne lâcherai rien et ne me satisferai pas de clopinettes syndicalo-ministérielles.

Deux mesures en revanche peuvent être affirmées rapidement tant elles sont simples à prendre, l'une d'ailleurs étant quasiment induite dans l'autre: l'affirmation de l'autonomie des écoles, et la gestion des 108 heures par les directeurs d'école. Qu'est-il besoin d'une surveillance presque policière par des IEN déjà surchargés de l'emploi du temps des écoles? Les directeurs ne sont donc pas considérés comme des adultes et des gestionnaires responsables? Il est vrai que l'infantilisation à outrance des personnels reste une des bases du fonctionnement de l’Éducation nationale, ce qu'il est largement temps de changer. Il faut donc laisser à la direction d'école la gestion de ces temps, dont il est nécessaire parallèlement de totalement la décharger. Comment peut-on raisonnablement envisager qu'un directeur d'école gère son établissement tout en encadrant des APC et en surveillant l’organisation du dispositif? Si je prends mon propre exemple, je suppose que je devrais accomplir ma mission proprement dite passées 18h? Ridicule. L'encadrement des APC en particulier est incompatible avec la mission de direction. Évidemment, laisser aux directeurs d'école le soin de gérer ces temps tout en les en dispensant serait en soit déjà une affirmation claire de l'autonomie des écoles, et de ce que les directeurs sont des professionnels reconnus.

Donc, il y a urgence. Double urgence. Pour le GDiD, de communiquer rapidement; pour le ministère de parler clairement avant les vacances, et de faire une première annonce simple et sans équivoque. Car les directeurs d'école ne se satisferont et ne se contenteront pas d'EVS et de "contrats aidés" qu'ils n'ont jamais demandé.

samedi 22 juin 2013

Harcèlement...


Quand on est un directeur d'école un peu impliqué dans la vie publique et citoyenne, lorsqu'on s'intéresse à tenter de changer les conditions de travail de sa branche professionnelle, lorsque comme moi on s'essaye à dénoncer une organisation aussi absurde que celle de l’Éducation nationale, on se retrouve souvent face à des questions et des problèmes dont on se rend rapidement compte qu'ils sont plus courants qu'ils n'y paraissent. Il faut dire que les services de l’État en général, comme les entreprises de services publics ou assimilées, font depuis des décennies du silence une des conditions premières de leur fonctionnement, sous prétexte d' "obligation de réserve" ou de "discrétion professionnelle". On ne dit rien, c'est le black-out total, c'est l' "omerta" permanente institutionnalisée.

Rappelons pour mémoire que la notion d' "obligation de réserve" n'existe pas dans les textes législatifs et réglementaires régissant la fonction publique française. La Loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ne fait nulle part mention d'un "devoir de réserve", ni d'une "obligation de réserve". C'est volontairement qu'il n'a pas été intégré à l'époque par M. Le Pors aux obligations des fonctionnaires, laissant à la jurisprudence le soin de réguler les situations rares et particulières.

Le "devoir de réserve" des fonctionnaires, comme celui des enseignants envers l'institution et leur hiérarchie, est donc une légende urbaine, ou du moins qui reste bien ancrée dans les cours d'école. Il en est d'autres, certaines concernant par exemple les directeurs d'école, quelques-uns les croyant instinctivement "quelque part" (sic) leurs supérieurs hiérarchiques, d'autres au contraire leur refusant leurs rares prérogatives comme celle de répartir élèves, classes, et moyens d'enseignement. C'est pourtant la Loi! Mais peu d'enseignants connaissent les textes qui régissent et encadrent leur métier.

Ce silence institutionnalisé, entré dans les mœurs enseignantes et qu'il faut combattre de toutes ses forces, porte avec lui des conséquences perverses. Pas tant pour le fonctionnement de l’État ou de l’Éducation nationale, qui est rarement publiquement dénoncé par le milieu, ni pour la discrétion professionnelle instinctivement observée par les enseignants ou les directeurs d'école qui jamais n'auraient l'idée de divulguer des renseignements familiaux qu'ils seraient amenés à connaître, ou encore pour l'accès de la presse aux écoles, chacun dans ce métier considérant avec raison l'école comme un sanctuaire qui doit surtout rester protégé des soubresauts sociaux ou moraux de la société civile.

Mais l'omerta en revanche doit être dénoncée avec force dans ce qui concerne les rapports humains au travail. L'État dénonce avec raison depuis quelques années le harcèlement entre élèves, qui a toujours existé et existera encore car un enfant est d'abord un petit monstre tant qu'il n'a pas été correctement éduqué, et tant l'effet de harcèlement de groupe porte en lui de satisfactions perverses partagées. Ce harcèlement doit être évidemment fortement combattu dès le premier signe, et sans concession aucune. C'est là le rôle d'un enseignant conscient et d'une direction d'école responsable. Car, étant du métier et ayant déjà rencontré le cas plusieurs fois, personne ne pourra me faire croire que ce genre de comportement puisse passer inaperçu. Les excuses ridicules qu'il m'a été donné de connaître à l'occasion de recherches sur le sujet sont effarantes de veulerie. Ce qui ne signifie pas non plus qu'il faille transformer toute altercation entre élèves en cas de "harcèlement", comme certaines familles aveuglées par des médias alarmistes voudraient le faire. Il faut dire dans ce dernier cas qu'il s'agit évidemment d'une méthode facile pour nier toute responsabilité de son propre enfant, qui remettrait en cause une éducation familiale parfois négligée ou dévoyée, au profit d'une victimisation fort pratique. Le fameux triangle persécuteur/sauveteur/victime a encore de beaux jours devant lui tant que l'humanité n'aura pas réussi à accéder à un niveau de conscience supérieur... et elle n'en prend pas le chemin.

Pour autant le harcèlement en milieu scolaire ne se limite pas aux élèves. Au même titre que dans les entreprises publiques, les cas de harcèlement entre collègues sont fréquents ("harcèlement horizontal"), comme les cas de harcèlement des directeurs d'école par les familles, et pire les cas de "harcèlement vertical" aussi.

J'ai pu observer au cours de ma carrière aujourd'hui longue des exemples où toute l'équipe des enseignants d'une école se liguait contre un collègue isolé qui avait le malheur de ne pas travailler comme eux, ou préférait rester en marge de manifestations pseudo-amicales et autres "pots".

J'ai connu nombre de cas de directeurs d'école harcelés par des familles. Sur ce sujet, le récent rapport Debarbieux-Fotinos de septembre 2012 est une somme. Combien de directeurs d'école harcelés pour les raisons les plus absurdes ont-ils dû se tourner vers une hiérarchie amorphe et sans courage, qui finit généralement par leur recommander de "changer d'école"?

J'ai pu également observer des cas de "harcèlement vertical", quand un directeur ou une directrice d'école prenait en grippe pour une raison inconnue un de ses adjoints et lui menait une vie impossible. Ce métier est déjà suffisamment difficile, énergivore, épuisant, sans y ajouter une pression quotidienne forte et injuste qui venant d'un adulte et d'un égal ne peut que porter doute de soi, dépression, et mener jusqu'au suicide. Oui, cela s'est vu, cela se voit, même si c'est souvent tu, car il ne faut pas faire de vagues... Certains syndicats, qui s'élèvent contre le statut des directeurs d'école que personnellement j'appelle pleinement de mes vœux, dénoncent souvent une éventuelle "caporalisation" de l'école, ou ce qu'ils appellent les "petits chefs". Je suis suffisamment conscient, et j'ai suffisamment de bouteille, pour savoir que le risque existe. J'ai connu des directeurs qui n'étaient pas à leur place. J'ai connu des harceleurs qu'il n'était possible que de fuir pour se préserver. Mais je m'élève fortement contre l'idée que le statut des directeurs d'école amènerait nécessairement des comportements de ce genre. Néanmoins, il est clair qu''un tel statut porte avec lui l'obligation de ne pas le délivrer à n'importe qui! Je suis bien évidemment pour que la direction d'école devienne complètement une mission "à profil". Aujourd'hui la plus grande partie de la fonction consiste en un travail de communication et d'organisation, il existe suffisamment sur le terrain de directeurs et directrices d'école qui ont fait leurs preuves dans ces domaines pour ne pas se trouver en panne de futurs gestionnaires d'école.

Second cas de "harcèlement vertical", totalement nié par l'institution, celui de la hiérarchie existante envers les directeurs d'école. Le 26 février dernier, Vincent Peillon, ministre de l’éducation nationale, et Eric Debarbieux, délégué ministériel, ont dressé un point d’étape sur les travaux de la délégation ministérielle chargée de la prévention et de la lutte contre les violences en milieu scolaire. On peut y lire:

Le rapport 2011 du Carrefour Santé Social et les enquêtes de victimation menées ces dernières années montrent que l’exposition des personnels d’enseignement et d’éducation à des violences répétées est un facteur de difficulté, de tension, voire d’épuisement professionnel (burn-out).

Dans le cas de personnels confrontés au quotidien à un climat scolaire dégradé, la solidarité au sein de l’équipe pédagogique et le soutien de la hiérarchie constituent souvent la meilleure des réponses. Les milliers de participants aux différentes enquêtes de victimation insistent d’ailleurs sur l’importance de la réactivité et du soutien des collègues et de la hiérarchie lorsqu’un enseignant ou un personnel d’éducation doit faire face à des tensions répétées.

Évidemment, ces propos sont absurdes lorsqu'on évoque le cas d'un supérieur hiérarchique qui harcèlerait un professeur ou un directeur d'école. Un directeur d'école victime ne pourrait donc trouver refuge pour se protéger qu'auprès de son harceleur?

La plupart des académies ont mis en place des dispositifs ad hoc : cellules d’écoute et d’assistance, réseaux d’aide, personnes ressources, etc. "

Les "dispositifs" dont il est fait mention sont normalement destinés à recueillir les problèmes d'enseignants confrontés à d'autres problèmes que celui du harcèlement: le Ministère entretient ici une confusion délétère entre les victimes de harcèlement moral et les profs "fragiles" ou en proie au "burn-out". J'ai connaissance d'un cas très récent -en cours devrais-je écrire- dans lequel il a fallu à un directeur d'école harcelé par son IEN le soutien de ses homologues pour mettre en branle le CHSCT (comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail). Je ne connais pas les suites qui seront données, mais je suis extrêmement dubitatif. Wait and see. Toujours est-il que le directeur d'école en question, par ailleurs irréprochable de l'avis même de ses confrères, est aujourd'hui gravement malade. Pourra-t-il continuer sa mission par la suite? En aura-t-il la force? J'en doute aussi, hélas.

Le dernier cas de "harcèlement vertical" que je dois évoquer, et hélas il est très courant, est celui des directeurs d'école par leurs adjoints, ou un de leurs adjoints. De ce cas, j'en connais à la pelle! Il s'agit là d'une "verticalité ascendante" totalement niée aussi bien par l'institution que par les syndicats pourtant sensés défendre tous les personnels. Un directeur d'école sans statut n'est rien, certains le savent, en profitent et en abusent. La direction d'école concernée n'a d'autre choix que de se tourner vers sa hiérarchie, qui considérera souvent, et c'est un comble, que le directeur en question "ne sait pas se faire respecter" -alors qu'il n'a pas les moyens institutionnels pour-, que c'est un faible qui n'est pas à sa place, et lui suggérera généralement -encore une fois!- de "changer d'école", ou pire de demander un poste d'adjoint. Voilà comment la hiérarchie de l'Education nationale gère la réalité des violences scolaires entre adultes: elle les nie, et charge encore un peu plus la victime. Quel adjectif pourrais-je ajouter? Lamentable? Catastrophique? Désastreux? De toute façon, c'est d'une totale injustice, et d'une inhumanité frappante.

Je suis désolé, le billet d'aujourd'hui n'était pas drôle, mais le sujet ne s'y prête pas, et c'est de cela que j'avais envie de parler aujourd'hui. Il est absolument nécessaire de totalement réviser, je l'ai déjà écrit, je le répéterai sans fin, il est totalement nécessaire de bousculer totalement la pyramide de l’Éducation nationale, d'en changer les fonctionnements qui nient l'humain au profit d'une machine dont je suis le premier à dire que les rouages devraient tourner sans heurt, mais qui aujourd'hui grincent abominablement et grippent de partout. Commençons par le commencement, c'est à dire le fonctionnement sur le terrain. Interrogés par des syndicats qui pourtant ne sont pas favorables au statut des directeurs d'école, les enseignants réclament eux-mêmes une hiérarchie proche d'eux et de leurs préoccupations quotidiennes. Donnez enfin aux directeurs d'école le statut qui leur est nécessaire, qui les protégera, et leur apportera les moyens locaux de leur action au service de leurs élèves.

mercredi 19 juin 2013

On ze go...


Les discussions sur la direction d'école ont -enfin- commencé. Il s'agit bien de discussions, les négociations sont évidemment réservées aux organisations syndicales qui ont légalement le mandat pour le faire. Le GDiD a donc, comme seule association de directeurs d'école publique à envergure nationale, toute légitimité pour être écouté par le ministre et son cabinet. Ce sera le cas le jeudi 20 juin, alors qu'il avait déjà été convié à discuter à la DGESCO en préliminaire.

Mais je réitère mon interrogation du billet précédent: si le GDiD sera écouté, sera-t-il pour autant entendu?

Dans cette affaire, qui concerne directement toutes les directrices et tous les directeurs des écoles publiques de France, les intérêts et revendications sont divergents. Déjà les syndicats qui sont allés au ministère tentent de tirer la couverture à eux. C'est normal de la part du SE, qui a fait beaucoup pour que ces entretiens débutent rapidement. Cela l'est moins de la part du SNUipp qui, contrairement à ce qu'il clame aujourd'hui, a tout fait pour qu'elles n'aient pas lieu.

Nous recevons donc aujourd'hui des commentaires victorieux de partout, du style "nous avons été entendus", et patata. Or ces commentaires ne donnent pas l'impression que les directeurs d'école eux le soient.

Effectivement, la première mesure mise en avant par les centrales syndicales est celle du réemploi ou de l'emploi de 12000 postes d'EVS, et d'un certain nombre de contrats aidés, autre joyeuseté dont je perçois mal l'intérêt pour la direction d'école. Pire, j'y vois une façon parfaitement claire de détourner le problème, pour plusieurs raisons:

1) d'où sort cet argent? 12000 EVS, ce sont -je l'ai déjà écrit- 4000 postes d'enseignants, qui seraient certainement plus utiles dans les écoles que des bouche-trous qui, à part pour certains nostalgiques (ah les pauvres EVS, et ragnagna), ne remplaceront jamais un vrai secrétariat ou un "maître" supplémentaire apte à prendre une classe en charge; sans même parler de la formation de ces gens-là, qu'il va falloir pour les directeurs d'école assumer en plus de leurs deux métiers; n'ayant personnellement pas dans ma petite école la possibilité d'être parallèlement enseignant six heures par jour et directeur d'école, mission que je ne peux remplir que sur mon temps libre, où donc trouverais-je le temps et l'énergie de former un adulte? Je suis gentil, je ne donnerai pas une fois de plus le bilan désastreux du dispositif EVS de ces dernières années, autant en terme de formation d'adulte et de débouché, qu'en terme d'utilité dans les écoles... Alors si on ajoute maintenant des "contrats aidés", wouah, quel bonheur en perspective!

2) les EVS sont pour les syndicats un écran de fumée bien pratique pour cacher l'indigence de la direction d'école, dont plusieurs centrales ne veulent tout simplement pas voir reconnus le professionnalisme et l'originalité; je ne le répéterai jamais assez, être directeur d'école aujourd'hui est un métier à part de celui d'enseignant, il réclame des compétences particulières et un savoir-faire unique, de l'entregent, de l'enthousiasme; pourquoi certains refusent-ils de l'admettre?

3) les EVS ne servent à rien dans les écoles, je parle en connaissance de cause, sinon à entériner l'idée que le métier de directeur d'école serait uniquement et purement administratif, une sorte de super-secrétariat d'école au service des enseignants. C'est ce que nous serine le SNUipp depuis des lustres, qui nie -comme les syndicats d'extrême-gauche- ce qui aujourd'hui constitue les majeures et les meilleures parties de notre mission, celles qui motivent encore la plupart d'entre nous, soit l'organisationnel et la communication. Or ces deux tâches ne peuvent pas être déléguées! Personne d'autre que le directeur d'école, dont la connaissance globale de son école est unique, ne peut la représenter auprès d'une municipalité ou d'un organisme partenaire comme le Conseil général avec lequel nous avons de plus en plus souvent affaire. Personne d'autre que le directeur d'école ne peut représenter l'institution ou l’État auprès des familles. Personne d'autre que le directeur d'école ne peut organiser son établissement dans le respect des règles de sécurité et des textes officiels. Si le travail simplement administratif nous prend quelques heures, notre rôle d'organisateur et de communiquant nous prend 60 à 80 % de notre temps et de notre énergie. 80 %, c'est largement le cas dans ma petite école maternelle. Je ne suis pas le seul à dire, mais peut-être le criai-je plus fort, que les EVS traînent souvent comme des âmes en peine dans les écoles faute de travail à leur mesure, ou sont employés à des tâches qu'ils ne devraient pas remplir, et remplacent par exemple des ATSEM dont ils n'ont pas les droits, le salaire, et l'efficacité. Je le répète, les EVS ne servent à rien, qu'on crée plutôt quelques milliers de postes d'enseignants pour nous décharger -je ne le suis pas du tout- et la charge administrative disparaitra rapidement de nos préoccupations. Je veux qu'on me donne du temps pour la gérer, mais du temps à moi, pas celui d'un autre qui n'y panne que couic et dont de toute façon je devrai vérifier et rectifier le travail.

Qu'est-ce que je réclame aujourd'hui, moi, directeur d'une petite école publique française? Un peu de temps, mais du temps de professionnel. Qu'on me libère de diverses réunions et autres APC qui ne font que prendre du temps sur mon travail réellement utile. De la reconnaissance institutionnelle pour ma charge et ma responsabilité. Une vraie place dans l'organigramme de l'éducation nationale, place reconnue par tous, hiérarchie, municipalités, familles, enseignants. De l'autonomie pour les projets adaptés à mon école et à son public. Une existence juridique qui me laisse l'opportunité de certains choix et de les assumer face à nos partenaires locaux. Un peu d'argent, pourquoi pas, qui reconnaisse mon investissement personnel dans l'accomplissement de cette mission compliquée et si importante, ce qui peut passer certes par un salaire mieux adapté mais aussi par une carrière accélérée grâce par exemple à des points supplémentaires pour l'accès à la hors-classe. Qu'on me reconnaisse pour ce que je suis -zut!- soit souvent l'ultime représentant de l’État dans une commune, le point d'ancrage de l'école, l'interlocuteur unique et indispensable des partenaires de l'école qui comptent sur moi pour la réussite scolaire des élèves et l'efficience de mon établissement. Bref, qu'on reconnaisse que le directeur d'école a un métier à part, qu'il n'est plus un enseignant chargé d'une mission particulière mais un professionnel aux compétences parfaitement différenciées.

Je pense que nous aurons rapidement des échos de ce qui aura été dit à Alain Rei, président du GDiD. Espérons que notre attente -douze ans c'est long- n'aura pas été vaine. Le SE-Unsa avait posé une "alerte sociale": espérons donc aussi que les directeurs des écoles publiques de France n'auront pas à se lancer dans une grève spécifique dès la rentrée de septembre.

dimanche 16 juin 2013

Le dirlo est surbooké...


Ce blog est pour moi un acte militant. Si je me donne la peine d'écrire et d'y poster avec la plus grande régularité possible des billets sur les divers aspects de nos métiers de directeurs d'école, c'est parce que, je l'ai déjà maintes fois écrit, je ne veux pas que perdure la situation absurde dans laquelle nous nous trouvons: décideurs sans pouvoir de décision, organisateurs sans moyens, au service de tout et de tous sans en récolter les fruits.

Je fais de temps en temps un petit tour sur les forums Enseignants du primaire, forums que je trouve particulièrement pratiques pour les "jeunes" directeurs d'école qui peuvent y poser questions diverses et états d'âmes, et généralement reçoivent rapidement une ou plusieurs réponses. Ce qui est frappant à chaque période du mouvement, c'est la façon dont plusieurs viennent exposer leur dilemme: dois-je demander une direction d'école? Pour beaucoup d'entre eux la question du métier de directeur ne se pose même pas, il s'agit surtout de se rapprocher de son domicile, ou de quitter une situation désastreuse dans une campagne quelconque. Je comprends parfaitement qu'on puisse envisager de prendre la direction d'une école en fonction de besoins de ce genre. Mais il est étonnant de constater à quel point ces jeunes gens ignorent dans quel guêpier ils vont se fourrer. Oh, les premières années se passent généralement bien, je suppose d'ailleurs que ce fut notre lot à tous, directrices et directeurs aujourd'hui chevronnés. Mais il arrive fatalement plus ou moins tôt une crise, avec une famille, avec des collègues, avec la municipalité, avec la hiérarchie. Crise qui hélas remet durement voire cruellement les pendules à l'heure quant à notre position réelle dans la société et dans l'organigramme de l’Éducation nationale, et quant à nos réelles possibilités d'action ou de réponse. Peut-on sortir indemne d'une telle crise? Certainement non. Même si notre capacité de résilience est importante, il restera toujours dans un coin obscur de notre conscience un regret, un chagrin, ou de la rage de n'avoir pu faire ou dire ce que nous aurions souhaité dire et faire. J'ai connu cela, bien entendu, j'évoque cette situation en connaissance de cause, et je sais que je garderai toujours un poids certes caché mais bien présent.

Tiens? Dans mon premier paragraphe de ce billet j'ai écrit "nos métiers de directeurs d'école". C'est amusant comme notre inconscient fait surgir parfois des vérités qui peut-être ne verraient pas consciemment le jour. Un discussion récente avec un collègue pourtant comme moi en maternelle me montrait qu'il y a autant de pratiques de direction d'école que d'écoles. Certes le fond de notre action reste le même partout: application des textes, organisation, communication. Mais qui peut croire que les pratiques seront les mêmes entre un direction élémentaire et une direction maternelle? Entre une grosse école de douze classes et une petite de trois? Untel devra accentuer la communication au sein de son établissement, son voisin lui devra être particulièrement attentif à l'aspect organisationnel de sa mission, etc. Notre métier, mon métier, c'est directeur d'école. Mais je reste conscient qu'on ne pourra pas appliquer les mêmes recettes selon l'équipe d'enseignants avec laquelle nous devrons travailler, selon le public auquel nous aurons à faire, selon l'encadrement institutionnel qui sera le nôtre, selon la municipalité avec laquelle nous serons en contact étroit, selon... Si seulement notre métier de directeur d'école était à la base lui-même clair, avec un cadre précis, avec une existence juridique et une reconnaissance installée!

Sur les mêmes forums que j'évoquais plus haut, une quelconque andouille syndiquée prétendait dans une discussion récente que le travail du directeur d'école est uniquement un travail administratif. J'aurais pu penser "Quel aveuglement!' si cette personne n'avait pas été représentant syndical d'une centrale qui depuis des lustres nie notre existence. Malheureusement, colporter de telles idées ne peut amener un jeune directeur d'école, qui méconnait en général les étroites frontières de notre mission, qu'à de cruelles désillusions, quand il aura constaté le changement d'attitude de ses collègues envers lui, le mépris de certains, l'animosité d'autres qui le considéreront curieusement comme un soudain ennemi, la charge des familles, le poids de l'administration, la fragilité des rapports avec la commune...

Je me donne comme tâche de continuer à tenir ce blog dans la mesure de mes moyens. J'admets qu'il est aussi une distraction dans le déroulement de mon quotidien, car j'aime écrire. D'autres joueront aux boules, feront du maquettisme ou du sport. Chacun son truc, chers collègues. A chacun sa façon de relâcher la tension de la fin d'année.

Là, comme vous, je suis surbooké. Bien que mon école soit petite, j'accumule comme vous les obligations et les devoirs en vrac: questions administratives multiples, admissions et passages, les élèves à tenir bien qu'excités et épuisés, les joyeusetés de fin d'année que sont voyages, sorties, manifestations festives diverses, dernier conseil d'école, commandes de matériel et fournitures, livrets scolaires et bilans de toutes sortes, échanges avec d'autres écoles, et patati et patata, et autres choses que je ne décrirai peut-être pas pour ne pas me dévoiler trop. J'ai un agenda de ministre, je vis au jour le jour, me félicitant chaque soir d'être arrivé au bout des tâches que je m'étais données pour la journée.

J'aimerais bien quand même ne pas avoir à y passer mes dimanches, mes mercredis, mes soirées. Rien à faire, car trop à faire! N'ayant avec ma petite école aucune décharge, je suis bien contraint de prendre les heures nécessaires à ma mission sur mon temps libre. Nombreuses, les heures en question, en ce moment. En toute franchise, une fois bouclées la ou les réunions extrascolaires du jour, je passe entre deux et trois heures chaque soir en ce moment à travailler pour ma direction. Et j'y passe mes journées de congé. Tiens, cet après-midi de dimanche, j'ai un gros boulot à commencer qui doit être bouclé au plus tard mercredi soir.

Ministre et syndicats sauront-ils tenir compte de cette charge lors des discussions qui débutent la semaine prochaine? Je fais confiance au GDiD pour exprimer à quel point nous sommes exploités, mais le GDiD, s'il sera écouté, sera-t-il entendu? Je n'attends pas le lune, car depuis trente-cinq ans que je fais ce boulot j'ai plus connu d'atermoiements, de renoncements et de désillusions que de réelles avancées pour faciliter ma tâche. Quant à la reconnaissance de la Nation, bernique. Il suffit d'ailleurs de lire sur les sites des médias les commentaires iniques de la population sur la fonction publique en général et les enseignants en particulier pour se rendre compte à quel point depuis toutes ces années les organisations syndicales qui parait-il nous représentent nous ont plus fait du mal qu'autre chose. Mais allez donc l'exprimer, vous serez traité de fasciste par ceux-là même qui nient votre existence. Au passage, être traité de fasciste par un extrémiste de gauche serait plutôt pour moi un gage de bonne conduite, une sorte de "bon point"... ou tout au moins un régal de fin gourmet.

Allons, il va falloir que j'y retourne. Au service de mes élèves, au service de mon école, au service de mes familles et de ma municipalité. Au service de mon administration aussi, ce qui est moins plaisant dans le sens ou celle-ci n'exprime sa reconnaissance que quand vous ne faites pas votre boulot. Bof, j'ai l'habitude, j'ai pris le pli de mépriser ceux qui me méprisent. Mais ce n'est pas moi qui ai commencé!

mercredi 12 juin 2013

Discussions...


M. le Ministre de l’Éducation nationale met en place dans la semaine du 17 juin un "groupe de travail" sur "les missions des directeurs d’école" -ce sont ses propres termes-, avec "les organisations syndicales représentatives ".

Quelle est la réelle signification des termes employés par le ministre, et quelles sont leurs incidences?

Un groupe de travail a déjà été créé au sein de la DGESCO, qui travaille depuis plusieurs mois sur la question. Je pense que la question de la direction d'école y a été épluchée en long et en travers, M. Delahaye étant un homme sérieux. Ceci signifie que le ministre ne partira pas sans billes, même s'il n'a pas forcément de grands moyens financiers à sa disposition.

La formulation du ministre n'est pas exclusive, y faire participer les "organisations syndicales représentatives" ne signifie pas qu'elles seront seules à faire partie du groupe de travail, car il s'agit bien de discussions, et non de négociations. Les négociations éventuelles auront lieu ensuite dans un cadre précis et légal avec la représentation syndicale. Ce qui signifie que le GDiD est parfaitement à sa place dans ce cadre au mois de juin, dans la mesure où il s'agit de la seule association de directeurs d'école existante qui ait une audience nationale.

Le second avantage d'un groupe de travail, c'est qu'il est possible d'y inviter les personnalités les plus diverses qui auraient leur mot à dire sur la question, en particulier certains députés par exemple qui se démènent pour certains depuis des années pour que les directeurs d'école obtiennent un statut clair, différencié, reconnu juridiquement et administrativement, qui marque enfin à quel point leur mission est aujourd'hui devenue un vrai métier qui n'a plus rien à voir avec ce qu'était la direction d'école il y a trente ans, ni avec le métier d'enseignant. Alors que la plupart des directeurs d'école cumulent les deux. J'aurais volontiers ajouté "sans défaillir", mais hélas cela ne peut plus être le cas, ceux qui affirmeront le contraire dans le meilleur des cas se trompent, dans le pire trompent autrui.

Ce qui me gêne plus dans les termes choisis par le ministre, c'est le terme "représentatives" qui qualifie les organisations syndicales qui participeront aux discussions. On peut comprendre que le ministre ne veuille pas engluer des discussions -dont je suppose qu'il les souhaite fructueuses- dans les revendications d'une myriade de syndicats aux audiences parfois fumeuses. Néanmoins, cela pourrait indiquer que seuls les représentants syndicaux du Comité Technique Ministériel (CTMEN) seraient éventuellement parties prenantes. C'est inquiétant, car le CTMEN compte une forte proportion d'adversaires farouches du statut de directeur d'école: 7 FSU (Christian Allemand, Jacques Aurigny, Nicolas Duveau, Anne Feray, Nathalie François, Frédérique Rolet, Sébastien Sihr), 3 CGT/FO/SUD (Jacques Paris, Patrick Désiré, Stéphanie Parquet-Gogos), soit 10 présumés contre, qui auront face à eux 4 UNSA (Christian Chevalier, Joël Pehau, Catherine Petitot, Jean-Yves Rocca) et 1 CFDT (Michelle Zorman).

Bref, si les discussions se font avec uniquement ces personnalités là, le SE-Unsa, le SGEN-Cfdt et le GDiD auront fort à faire. C'est d'autant plus dommage que la plupart des "petits" syndicats non représentés au CTMEN soutiennent l'action du GDiD.

Toutefois, même lorsqu'il s'agit de négociations, le CTMEN n'a qu'un rôle consultatif. Le ministre voudra-t-il néanmoins se mettre à dos les uns (le SE-Unsa pro-statut qui en posant une "alerte sociale" a déjà mis la menace d'une grève sur le tapis) ou les autres (le SNUipp et les syndicats d'extrême-gauche pour lesquels le statut pourrait être un casus belli à la rentrée)? Il me semble peu probable que M. Peillon, après les déboires de sa "refondation" et le cafouillage de l'affaire des rythmes scolaires, ait particulièrement envie d'une rentrée chaude en septembre prochain. Mais pourra-t-il en faire l'économie? Je ne pense pas que les directeurs des écoles primaires publiques françaises accepteront de se faire encore longtemps balader, sans l'assurance d'une réelle avancée de leur situation dans les mois qui viennent. Je ne pense pas non plus que l'école de la Nation puisse en faire l'économie, car en dépit des constantes dénégations des thuriféraires du statu quo elle est en train de crever du refus de certains de regarder les problèmes de l’Éducation nationale en face.

dimanche 9 juin 2013

Voilà comme ça coasse dans le marigot...


Il nous faut bien l'avouer, à notre grand dam, une grande partie des représentants du personnel de l’Éducation nationale ne se plait à vivre que dans un marigot pestilentiel d'idées surannées et de parti-pris nauséabonds. Monstres hybrides issus des derniers soubresauts d'un communisme qui n'en finit pas d'agoniser, certains de ces syndicats se complaisent à patauger dans les boues puantes, et y prospèrent.

Les prochaines élections professionnelles auront lieu en 2014. On va bien rigoler.

Parmi ces bestiaux peu ragoutants, nous pouvons citer pour mémoire quelques bestioles à l'audience aussi réduite que leurs haillons sentent le graillon, mais qui tout de même en s'égosillant parviennent parfois à capter l'attention de quelque malheureux passant égaré dans ces landes perverses, et qui ne sait pas dans quel bourbier infâme il va tomber:
- l' "unsencégété" (ah le sale parasite!), issu comme son nom l'indique des égarés syndicaux thuriféraires de Staline, ce qui suffirait à le disqualifier d'entrée pour tout s'il n'y avait pas encore d'étranges nostalgiques du médaillage à outrance et de la fraternité à sens unique;
- le "snudifo" (ouh la sale bête!), issu par scissiparité de la vermine précédente, et qui réunit encore les restes inhumains d'une hybridation infernale entre trotskysme, maoïsme et anarchisme... Joli mélange, mais ça marche encore!
- le "sudeducation" (oh la cochonnerie!), né par parthénogenèse, regroupe tous ceux qui se sont engueulés avec les animaux précédents; malheureusement, cet ectoparasite, une fois accroché, est difficile à enlever (sinon en tapant dessus très fort, mais il risque de répondre), et vagabonde au gré de ses lubies sans logique ni légitimité; heureusement, des trois bestiaux mentionnés, celui-ci est le plus rare.

En fait, ces trois syndicats prospèrent sur une idée unique et simple: je ne veux ni Dieu ni maître, ni patron, ni chef, ni directeur, ni contremaître, ni, ni, ni... Il ne servirait à rien de leur expliquer que cette pseudo-idée équivaut à un suicide collectif, ces animaux proches des lemmings sont par nature sourds comme des pots. Ce qui leur permet bien entendu de s'enfoncer à loisir et sans dégoût dans leur marais (ils sont aussi anosmiques, c'est bien pratique).

Je ferai donc fi de ces trois organismes. Ils n'en valent pas la peine.

En revanche, il existe dans le marigot un animal bien plus dangereux. Plus accrocheur que le chancre mou, mais tout aussi désagréable et douloureux, le "snuipp", car c'est de lui qu'il s'agit, est heureusement visible et audible de loin avec ses gros sabots sonores qui cataclopent à retardement. On peut donc lui échapper facilement, d'autant qu'il supporte difficilement le sarcasme et la moquerie, et s'échappe la queue entre les jambes dès qu'on fait mine de lui résister. Bête et couard, voilà bien un autre sale bestiau.

Né lui aussi par scissiparité lors de l'agonie d'un monstre antédiluvien à la perversité sans limite appelé "snipegc", il s'est rapidement différencié de son jumeau, le "seunsa", qui lui semble pouvoir s'apprivoiser facilement, ce qui ne signifie pas qu'il ne faille pas s'en méfier quand même (ça peut mordre, ces bêtes là, si on n'y prend pas garde!). Le "snuipp", lui, est resté dans les traces laissées par son géniteur, et s'approche assez dans sa conception binaire du monde qui l'entoure des trois parasites susmentionnés. Lui non plus ne veut ni Dieu, ni maître, ni chef, ni... Le "snuipp" fait preuve d'une stratégie particulièrement dépravée pour attirer ses victimes à lui: il vante les mérites de ses proies,  les cajole de divers passe-droit, leur fait croire qu'ils sont les meilleurs et les seuls à connaître l'ultime vérité, jusqu'à les prendre sous son aile et totalement les décérébrer. La victime du "snuipp" devient un zombie incapable de penser par lui-même, et méchant en plus.

Les discussions qui vont s'ouvrir au ministère de l’Éducation nationale quant à la direction d'école sont une belle illustration de toutes les plaisanteries que je viens de vous raconter. Pour l'instant, les trois monstres trotsko-anarcho-néant sont muets, mais je ne doute pas une seconde qu'ils l'ouvriront dès que les premières idées de mesures seront connues: incapables d'avoir une idée, ces gens là refusent tout par principe, ce qui est certes pratique, mais peu gratifiant intellectuellement.

En revanche, le SNUipp est lui bien embêté. Incapables de percevoir le mouvement de fond qui soulève les directeurs d'école depuis plusieurs années, ou plutôt en niant l'intérêt et l'importance, ces syndicalistes bornés sont aujourd'hui pris de court par leurs frères ennemis du SE-Unsa, qui a bel et bien pris la main, et d'importance, en soutenant le GDiD dans sa démarche honnête et constructive. Très étonnés que les directeurs d'école réunis en association aient pu aussi bien se débrouiller sans eux, les snuippiens sont pris entre les deux feux de leur credo insurmontable qui veut que les directeurs sont et devraient rester "des enseignants commes les autres", et la conscience que leur situation est intenable. Comment faire? Que dire? Leur seule et unique réaction pour l"instant a été de proférer une ânerie supplémentaire (mais on ne les compte plus), comme quoi le SNUipp et lui seul détiendrait la vérité ultime et insurpassable, et qu'il allait "nous la dire". C'est tout de même assez vexant, quand on y pense: si le SNUipp dit la vérité, cela signifie que tous les autres mentent, y compris les milliers de directeurs d'école qui n'en peuvent plus et se sont réunis en association au sein du GDiD... Dialectique qui sent quand même un peu l'encens des derniers sacrements.

Bref, inutile d'écouter n'importe quoi. Les crapauds infâmes qui coassent dans le marigot ne valent pas qu'on leur tende l'oreille. En revanche, chers collègues directeurs, s'ils font trop de bruit ou s'agitent un peu fort, n'hésitez pas... Je vous laisse choisir la méthode d'intervention qui vous conviendra le mieux.

samedi 8 juin 2013

C'est clair...



Un train en marche...


Après douze longues années d'efforts bénévoles mais constants, le GDiD a fini par gagner la "bataille des idées", comme on dit, même si je déteste les métaphores guerrières qui me rappellent fâcheusement le vocabulaire restreint des syndicats qui ne savent causer qu'en termes de "lutte" et autre "combat".

Le GDiD exprime depuis douze ans que la direction d'école s'enlise dans une voie sans issue. Sans autonomie, sans existence, sans reconnaissance, le directeur d'école publique français n'a aucun moyen d'adapter le projet de son école aux besoins réels de ses élèves. On en voit le résultat, pire d'année en année, depuis trois lustres.

Au cours des ans, nombreux sont ceux qui ont soutenu le GDiD et ses revendications, et persistent à le faire tant l'évidence qui s'est imposée à eux de la justesse de la cause ne peut être reniée une fois qu'on l'a admise. Les directeurs d'école, d'abord, de plus en plus nombreux chaque année au GDiD, mais aussi qui soutiennent l'association sans forcément y adhérer. Moi même ne l'ai rejointe que tardivement, lorsque soudain l'absurdité de la mission de direction exercée sans moyen m'a explosé à la figure. Saluons celles et ceux, directrices et directeurs d'école, qui ont animé l'association avec passion et abnégation avant de quitter la fonction de direction, par dégoût ou lassitude, ou simplement parce qu'ils prenaient leur retraite. Qu'ils soient remerciés de leur travail.

De nombreux adjoints aussi soutiennent le GDiD, parce qu'ils sont conscients des problèmes de la direction d'école et perçoivent l'intérêt d'un renouveau de la fonction avec de nouveaux moyens.

De nombreux élus également sont avec le GDiD, élus locaux d'abord, maires et conseillers municipaux, qui aimeraient avoir le loisir de discuter avec des directeurs reconnus et autonomes du fonctionnement d'une école qu'ils payent avec les deniers de leur commune. Les agents territoriaux aussi, directeurs de l'éducation ou secrétaires généraux, qui savent les directeurs d'école coincés dans leurs actions par des pesanteurs étatiques qui en France ont atteint ces dernières années des sommets.

Il y a pléthore de représentants de la Nation qui à l'Assemblée nationale martèlent depuis des années la nécessité d'un statut pour les directeurs d'école. Je ne citerai que le plus constant d'entre eux, le plus acharné, le plus fidèle à l'idée que la situation actuelle des directeurs d'école est ingérable, Monsieur Frédéric Reiss, qui il y a quelques jours encore à la chambre -le 5 juin pour être précis -, s'exprimait ainsi face au Ministre de l’Éducation nationale: "Comment peut-on vouloir refonder l’école sans reconsidérer la situation des pilotes que sont les directeurs d’école ? Ils sont les grands oubliés de cette réforme ! Leurs missions ne cessent de croître et de se complexifier, et ils seront en première ligne concernant la mise en place des nouveaux rythmes scolaires – réforme déstabilisante pour les élus locaux et les familles, qui ne concernera finalement que 20 % des élèves à la rentrée prochaine. (...) Priorité au primaire, oui ! Mais pas sans les directeurs !"

Les familles justement, parlons-en! Les parents d'élèves sont extrêmement surpris quand ils apprennent nos conditions de travail, le ridicule de notre salaire, notre absence de latitude quant au fonctionnement de notre école. Ils sont très étonnés quand ils apprennent que nous ne sommes pas les supérieurs hiérarchiques de nos adjoints, et que nous ne pouvons rien faire quand l'un d'entre eux s'avère incompétent, désagréable avec les familles, voire dangereux pour ses élèves, ou au contraire pour valoriser un collègue que nous voyons particulièrement efficace et dont nous souhaiterions tant propager les envies, connaissances, découvertes et innovations. Combien de directeurs d'école se sont trouvés aux prises avec un enseignant désagréable ou harceleur, sans rien pouvoir y faire ni même compter sur sa hiérarchie pour y remédier? Combien de directeurs d'école ont fini par quitter leur mission, dégoûtés, abîmés, atrocement désillusionnés tant par leur impossibilité d'action que par le désinvestissement de leur hiérarchie? Que de compétences perdues! Que de projets abandonnés!

Ainsi donc, enfin, après douze années d'efforts bénévoles, le ministère ouvre des "négociations" sur la mission de direction d'école. Pour ma part, le terme "négociations" me déplait, plus qu'il ne m'inquiète, car je considère qu'il n'y a rien proprement à négocier, du moins si on considère les revendications du GDiD. Le GDiD a toujours dit "Le statut d'abord, le reste ensuite", ce qui signifie que des négociations salariales doivent évidemment être engagées, mais que ce qui importe le plus est bien le statut des directeurs d'école et leur autonomie d'action. Je veux d'abord les moyens de ma mission, une existence et une reconnaissance juridique, institutionnelle et administrative, je veux un cadre d'emploi clair. Le salaire qui va avec peut à mon avis attendre quelques mois des négociations plus globales sur celui des enseignants du primaire, que chacun sait largement inférieur -sous quel prétexte à une époque ou les professeurs du primaire et du secondaire ont la même formation?- à celui de leurs collègues des collèges et lycées, et pire largement inférieur, de 30%, à celui des enseignants des grandes nations de l'OCDE.

Mais je peux comprendre le terme de "négociations" dans la mesure où ce seront surtout les "partenaires sociaux", auxquels le GDiD sera normalement associé, qui vont discuter le bout de gras avec le Ministre de l’Éducation nationale et le gouvernement à partir du 18 juin prochain. Il s'agit bien là de discussions institutionnelles, et on en utilise le vocabulaire. Juste une question: M. Jean-Paul Delahaye, directeur de la DGESCO, avait confirmé dernièrement que le GDiD serait "évidemment" partie prenante des discussions; M. Peillon, Ministre de l'Education nationale, a envoyé il y a deux jours un courrier encourageant à Alain Rei, président du GDiD; mais la participation du GDiD aux "négociations" a-t-elle été confirmée?

Il faut reconnaître que sans les syndicats la question de la direction d'école serait peut-être encore au point mort. Pardon, sans UN syndicat, le SE-Unsa pour être précis, qui depuis octobre 2012 suit une tactique propre et claire, et ne lâche pas le morceau. Je les en remercie, car malgré les efforts du GDiD on ne peut comparer le travail de ses bénévoles, déjà surchargés dans leur mission de direction quotidienne, avec celui que peut effectuer une centrale syndicale aux nombreux représentants déchargés. Encore faut-il avoir une idée claire de son objectif, et la constance de suivre la tactique élaborée. J'ai suffisamment tapé ici sur le SE-Unsa pour ne pas reconnaître son investissement dans le dossier, et surtout son efficacité. Je ne l'oublierai pas en 2014, lors des prochaines élections professionnelles, comme je n'oublierai pas l'acharnement mis par le SNUipp à nier mon existence et mes compétences de directeur d'école.

Car je dois dire un mot ici de la représentation professionnelle. Après des élections catastrophiques en 2011, lors desquelles seuls 38% des enseignants avaient voté, le SNUipp était sorti grand vainqueur, le SE-Unsa arrivant en seconde position. Le peu de représentativité des centrales syndicales de l’Éducation nationale, comme d'ailleurs leur peu d'adhérent -mais personne n'ose donner de chiffre!-, ne sont bien entendu que le fruit de leurs atermoiements et de leur constante négation des réalités du terrain. Les enseignants n'en peuvent plus de ces syndicats qui parlent et agissent en leur nom sans réellement mettre en avant leurs réelles difficultés, voire qui vont jusqu'à les nier, préférant nettement pour le SNUipp par exemple des convictions politiques surannées à l'étude des conditions de travail des enseignants. L'exemple des EVS, qu'on veut continuer à nous imposer en dépit des réticences ou du franc refus de la plupart des directeurs d'école qui préfèreraient nettement avoir le temps et les moyens de leur mission, est très parlant. Je ne parlerai pas de FO, SUD ou la CGT, qui n'existent que par la volonté de la centrale qui les coiffe, et n'imaginent pas une seconde qu'il existe des gens qui bossent chaque jour dans les écoles. Mais c'est aujourd'hui devenu un gros souci pour ces syndicats non-représentatifs que les revendications des directeurs d'école, initiées par le GDiD et reprises par le SE-Unsa. Car enfin dans les écoles les actes quotidiens de ces directrices et directeurs sont primordiaux pour l'image des centrales syndicales; sans les directeurs d'école, plus d'information passée aux adjoints, plus aucun moyen de les toucher -les magazines syndicaux ne sont plus déballés, les courriels syndicaux ne sont pas partagés-, plus aucun moyen de les convaincre ou simplement d'exercer une quelconque propagande. Et puis, l'aura et la parole d'un directeur d'école reste importantes dans une école, le nier serait nier l'évidence. Alors un directeur d'école qui ne suit pas une consigne syndicale, un directeur d'école qui ne se met pas en grève, un directeur d'école qui vante les positions d'un syndicat, ce n'est certes pas parole d'évangile, mais ça a valeur d'exemple. A bon entendeur...

C'est ainsi qu'aujourd'hui ce fameux train qui doit entraîner enfin la création d'un statut particulier pour les directeurs d'école s'est mis en marche. Le GDiD et le SE-Unsa sont dans le wagon de tête. Et on voit, avec une certaine curiosité entomologique, les autres syndicats essayer de monter en marche. Efforts dérisoires, certes. Il ne faut aucunement s'illusionner sur la volonté réelle d'un syndicat comme le SNUipp de travailler à la création d'un statut pour les directeurs d'école. Mais il ne faudrait pas non plus oublier la capacité de nuisance de ces gens-là, qui agiteront rapidement certains chiffons rouges au nom d'un "Ni Dieu ni maître" ridicule, feront bouger le spectre d'un statut hiérarchique qui fait peur aux adjoints, et crieront avec un bel ensemble à la "caporalisation" de l'enseignement -Bonaparte pas mort!- et aux "petits chefs" -pourquoi petits?-. Les centrales syndicales qui préfèrent crever dans le statu quo et la suffisance qu'évoluer aiment jouer sur la peur. On se demande bien pourquoi d'ailleurs les enseignants auraient peur de directeurs d'école supérieurs hiérarchiques, car dans une enquête récente qui nous vient de SUD -c'est un comble!- ils se plaignent amèrement de l'éloignement de leur hiérarchie et de son peu d'intérêt pour leurs préoccupations quotidiennes. Je connais la solution, moi. Pourtant elle n'est pas à l'ordre du jour car le mandat du GDiD l'amène à réclamer un statut non-hiérarchique, ménageant d'ailleurs de cette façon les IEN et leur principal syndicat, le SIEN, qui soutient le GDiD dans ses revendications.

Donc mes amis, chers collègues ou soutiens, si le train a démarré, il nous demande encore plus d'efforts aujourd'hui pour soutenir sa marche. Nous allons devoir éviter les chausse-trappes syndicales, enlever les bâtons que certains s'ingénieront à nous mettre dans les roues, et casser les freins qu'ils tenteront de poser. Je ne doute aucunement de la volonté du GDiD d'y parvenir. Mais sans votre soutien, partout sur le terrain, dans toutes les écoles de France, le travail sera beaucoup plus difficile! Adhérez au GDiD, parlez-en autour de vous, même si la période bousculée et stressante de juin est toujours peu propice à ce genre d'action. C'est ensemble, groupés, solidaires, que nous y arriverons enfin, à ce statut.

mercredi 5 juin 2013

EVS: calcul rapide...


Pour compléter le billet précédent, j'ai calculé rapidement ce que coûtaient 12000 postes d'EVS. Un EVS coûte, j'arrondis, 1000 € par mois -et il n'y a pas de quoi être fier de payer un EVS 600 €, je n'arrive pas à comprendre pourquoi les syndicats courent après ces pseudo-emplois-. Pour 12000 postes, cela représente à peu près 150 millions par an.

Ces 150 millions représentent, si on prend le salaire moyen actuel d'un professeur des écoles en France, 4000 postes d'enseignants! 4000 postes, ce sont chaque semaine 36000 demi-journées de décharge qui ne sont pas attribuées aux directeurs d'école.

Il y a approximativement, si on ne tient pas compte des classes uniques en voie de disparition, 13500 directions d'école sans aucune décharge dans notre pays. On pourrait allègrement avec 4000 postes d'enseignants décharger tous ces directeurs d'école une journée par semaine, et il resterait 9000 demi-journées de décharge qu'il serait loisible de donner en plus aux directeurs d'école déjà déchargés et qui en auraient le plus besoin.

Ce calcul est-il suffisamment parlant?

EVS: attention danger !


Le syndicat SE-Unsa vient donc de poser une "alerte sociale", préalable légal à tout appel à la grève, sur la question cruciale pour l'école de la République des directeurs d'école, dont je décris assez ici à longueur de billet la situation absurde et la profonde lassitude pour m'appesantir encore une fois dessus. L'abandon dans lequel nous laisse l’État depuis des lustres augure mal de la réelle volonté des gouvernements qui se succèdent dans ce pays de sauvegarder notre école publique, dont pourtant plusieurs rapports récents rapportent -contrairement aux idées reçues et propagées- l'efficience face à l'école privée.

Je précise que je considère pour ma part l'école privée comme un maillon indispensable de la chaîne de liberté qui unit la Nation. Il ne s'agit pas pour moi de m'en faire le chantre, mais bien de reconnaître le rôle important qu'elle joue en France. Ce qui n'interdit pas non plus d'admettre que notre école primaire publique, qui continue à fonctionner malgré les obstacles qu'on ne cesse de poser devant sa route, reste pour la majorité des enfants de ce pays le lieu privilégié des premiers pas vers la connaissance, la compétence, et la socialisation.

L' "alerte sociale" du SE-Unsa, si elle est importante, montre tout de même les limites de ce genre de revendication. Effectivement, un des points cruciaux relevé par ce syndicat est celui des "Emplois Vie Scolaire", ou EVS, que depuis des années on nous décrit comme la panacée pour la direction d'école. Je m'élève vigoureusement contre cette idée!

Les EVS sont des emplois précaires, que le directeur d'école doit lui-même former (sur quel temps? avec quelles compétences?), et qui ne font que conforter la situation présente. De plus, ils ne sont pas généralisés, et les petites écoles n'en voient pas la couleur alors que leurs directeurs n'ont même pas le plus minime temps de décharge nécessaire à leur mission (12000 EVS annoncés par le ministre, pour plus de 45000 écoles!). Enfin, quand dans un organisme quelconque on recherche un(e) secrétaire de direction, on recherche une personne qui saura être efficace dès le premier jour. et soulagera réellement la charge de travail de celle ou celui qu'elle assiste. On ne recherche pas l'inverse sous des prétextes sociaux.

Pas étonnant que les syndicats d'extrême-gauche soutiennent parfaitement l'emploi et le ré-emploi des EVS dans les écoles. Pour Sud, FO ou la CGT, pour également le SNUipp, le directeur d'école n'existe pas, et ne doit surtout pas exister! Ces gens-là refusent d'admettre qu'en 2013 la direction d'école soit un métier à part entière. Et ils préfèrent réclamer la création et la titularisation d'un nouveau corps d'EVS plutôt que la création d'un statut spécifique pour les directeurs d'école.

Chers collègues, ne vous trompez pas de combat! Notre pays ne peut pas faire l'économie d'un statut pour la direction d'école. Et celui-ci ne peut pas passer par les EVS. Pourquoi dépenser autant d'argent dans un dispositif de ce genre? Alors que les directeurs d'école pourraient bénéficier de nombreux jours de décharge supplémentaires, en particulier dans les petites écoles dont les responsables se désespèrent quotidiennement d'avoir à se partager entre leur classe et leur mission.

Bref, ne mettons cette question en préalable à toute discussion. Si un secrétariat peut être intéressant dans les écoles de taille importante, les premières revendications de la grande majorité des directeurs d'école sont bien d'avoir du temps pour leur mission, et les moyens pour l'exercer. Ce temps doit passer par une reconnaissance institutionnelle, autrement dit un statut clair et différencié, une reconnaissance juridique et institutionnelle. Pas par des pis-allers qui n'arrangent que des syndicats qui voudraient bien voir l'école publique s'enfoncer encore un peu plus dans la fange.

dimanche 2 juin 2013

Trois dangers qui guettent le marin...


Pour compléter mon billet précédent, voici la description de trois des principaux dangers qui guettent le marin, en dehors de ceux inhérents à la navigation -écueils, bancs de sable, tempêtes...-, et quelques conseils sommaires pour tenter de les éviter.

1) Les sirènes:


Les sirènes sont des créatures funestes, mais en les connaissant mieux vous saurez en éviter les charmes vénéneux. Leurs noms sont connus: elles s'appellent Snuipp, Cégété, Efo, Sud, pour les plus dangereuses. D'autres sirènes sont moins perverses, voire bienveillantes. Mais les quatre que j'ai nommées sont à éviter comme la peste!
Les sirènes susurrent des chants langoureux en s'accompagnant de la lyre ou du pipeau, et subjuguent les matelots qui se croient alors plus compétents que leur capitaine, et tentent alors souvent de prendre la barre, quitte à amener le navire droit sur le premier écueil pour l'y échouer. Certains marins qui gardent le chant des sirènes en mémoire peuvent tenter d'entraîner dans leur délire leurs camarades de carrée, y arrivent parfois. A ce stade, il devient difficile pour le capitaine de reprendre la main. Mieux vaut éviter le danger en amont.
Pour ce faire, le capitaine peut chanter plus fort que les sirènes, et ça marche à tous les coups. Il peut également faire remarquer sarcastiquement à quel point ces chants langoureux sont en fait bourrés de mauvaises notes, mal interprétés, sans queue ni tête. Cela aussi fonctionne très bien, et d'emblée.
Notez que le capitaine, s'il intervient dès les premières notes entendues -et il doit avoir constamment l'oreille aux aguets-, saura facilement éviter de laisser les sirènes circonvenir son équipage.

2) Les serpents de mer:


Les serpents de mer sont des créatures désagréables qui reviennent assaillir nos esquifs avec une régularité pénible. Ils peuvent facilement faire couler, en un temps record, n'importe quel navire de quelque tonnage qu'il soit. Eux aussi ont des noms connus, comme Conseil ou Services, mais le plus célèbre d'entre eux s'appelle Répartition. Quand Répartition attaque un bateau par le flanc et que le capitaine ne réagit pas immédiatement, tout l'équipage peut facilement passer par-dessus bord, comme il peut aussi perdre simplement tout sens commun et s'entretuer avec résolution.
Tous les bâtiments de la flotte française que je connais ont déjà été attaqués au moins une fois par Répartition.
Le capitaine peut facilement venir à bout d'un serpent de mer s'il sait montrer sa détermination: c'est LUI qui tient la barre, et il la tient avec fermeté. En général n'importe quel serpent de mer s'enfuit alors dépité de son échec.

3) La pieuvre géante:


Voilà certainement le danger extérieur le plus difficile à surmonter pour n'importe quel capitaine, aussi expérimenté soit-il. Les pieuvres géantes restent cachées un certain temps sous la quille, mais distillent leur venin dans l'esprit de l'équipage, même s'il a déjà de longues années de navigation commune.
J'en ai rencontré quelques-unes, en particulier Rumeur et Motion.
Curieusement, la pieuvre géante peut mettre à mal en quelques jours, voire en quelques heures, tous les navires d'une escadre, jusqu'à une flotte entière!  Ce monstre est particulièrement efficace, et extrêmement dangereux. Certains capitaines qui n'arrivaient pas à maîtriser la bête ont dû parfois faire appel à l'amiral de la flotte pour résoudre le problème, l'aura de cet officier supérieur étant souvent suffisante pour faire fuir l'animal. La solution est donc là: comme pour les serpents de mer, c'est la détermination du capitaine à tenir la barre d'une main ferme qui la plupart du temps fera cesser l'attaque. L'équipage calmé oubliera très vite l'agression dont il aura été victime. Mais attention! Personne ne sort jamais indemne d'une attaque de pieuvre géante, et on a vu des équipes de matelots soudés se séparer avec fortes imprécations dès l'arrivée au port. Le capitaine doit donc veiller constamment, rester totalement attentif à tout ce qui pourrait suggérer la présence d'un de ces redoutables monstres, afin d'en éviter d'emblée la proximité, et plus tôt il interviendra pour reprendre les commandes plus efficace sera son action.

J'espère que ces quelques conseils sauront faciliter votre navigation. Avec toute mon amitié et ma considération pour la tâche difficile que vous savez assumer quotidiennement. Courage!

samedi 1 juin 2013

Ô mon batôôô, oh oh oh !


Souvent des images rigolotes viennent à mon esprit. Ce matin le directeur d'école que je suis s'imaginait naviguant sur les flots à la barre de son bateau, tentant d'amener à bon port ses passagers...

Je ne me leurre pas, avec ma petite école maternelle je reste capitaine d'un caboteur! Je n'ai pas choisi la navigation hauturière, et si j'aperçois au loin des paquebots -plus ou moins reluisants- qui croisent en haute mer vers des destinations lointaines et exotiques, mon choix s'est porté sur la navigation côtière. D'autre part, mon caboteur est de petite taille, je ne transporte que soixante passagers, et mon équipage est réduit. Toutefois mon bateau a bonne réputation, il est repeint de frais, et n'a jamais connu d'avarie. Je suis un capitaine estimé, mes passagers me font pleinement confiance, j'ai le soutien inconditionnel de la capitainerie, et j'ai toujours réussi mes traversées.

Cependant il faut avouer que la navigation est de plus en plus difficile. Les eaux sont souvent maintenant infestées de créatures marines étranges, les écueils sont de plus en plus fréquents, certains passagers deviennent difficiles à satisfaire, beaucoup n'ont pas le pied marin, et surtout les règles de navigation changent de plus en plus souvent tout en devenant de plus en plus inadaptées. Mais que fait donc la Direction des affaires maritimes? J'aimerais bien pouvoir comme avant naviguer en ligne droite avec des passagers confiants et sages. Mais il n'en est plus question. Nous frôlons souvent le naufrage, et je ne dois parfois la sauvegarde de mon frêle esquif qu'à mon expérience de capitaine chevronné et à celle d'un équipage dévoué et attentif...

Il est amusant de constater à quel point certaines analogies sont adaptées. Celle-ci, qui s'est imposée à moi après une nuit agitée -traditionnelle je le suppose chez les directeurs d'école en fin d'année scolaire-, est peut-être drôle mais reste néanmoins très proche de mes réalités quotidiennes, celle d'un directeur d'une petite école maternelle, soutenu par sa municipalité mais ébranlé par les soubresauts du système scolaire.

Puis-je dire que l’Éducation nationale, depuis plusieurs décennies, a coupé les ailes de ses commandants de navire? Pour une analogie maritime, c'est osé. Mais c'est bien de cela qu'il s'agit. Je me sens comme un capitaine mésestimé, mal rémunéré, et surtout sans aucun pouvoir reconnu, ni administrativement ni juridiquement ni socialement. Je n'ai aucun choix -ou si réduit- pour barrer mon bateau, seule compte la volonté de mon administration, aussi absurde souvent puisse-t-elle être. Je n'ai que l'opportunité d'éviter au mieux le naufrage, et encore ne pourrai-je le faire qu'avec une marge de manœuvre très réduite. Je sais néanmoins que je serai toujours le fusible le plus commode en cas de pépin, ou si la machinerie grippe.

Encore m'estimai-je heureux de ne conduire qu'un caboteur! Combien de collègues commandent des paquebots aux passagers innombrables? On m'a parlé d'équipages qui n'admettent pas d'avoir un capitaine, et qui prétendent qu'un navire de fort tonnage peut fort bien être dirigé collégialement... Ainsi en est-il dans l’Éducation nationale. Notre armateur refuse toujours de se prononcer clairement sur les prérogatives de ses capitaines, et des équipages abusés ou confortés dans leur égoïsme freinent la marche du navire en brandissant une prétendue égalité entre le capitaine et ses matelots... Beaucoup de ces navires vont s'échouer, ou faire naufrage, et le capitaine en sera tenu pour responsable en dépit de toute logique. Car il faut beaucoup de compétence, de force et d'énergie à un directeur d'école pour maintenir la machine à flot en dépit des écueils qu'il rencontre quotidiennement.

Combien de temps les directeurs des écoles publiques françaises devront-ils encore attendre que leur métier, car c'en est un, soit reconnu? Combien de temps faudra-t-il encore pour que la direction d'école ait un statut, reconnaissance juridique, reconnaissance administrative, reconnaissance financière? Ce ne pourra être qu'au plein et entier bénéfice de nos élèves, ces petits français qu'on promène depuis des décennies au gré des états d'âme et des directives les plus diverses. Il faut avancer, Monsieur le Ministre, il faut avancer, avant que l’Éducation nationale, ce monstrueux Titanic, se soit définitivement enfoncée dans les eaux froides et qu'il ne reste plus qu'une épave historique mais qui ne pourra être renflouée.